Des mots comme ça, tribute to Saya

"L'ignores-tu? Tu n'es pas humain. Te comporter comme un homme, défendre leur cause alors que tu n'es pas plus humain que moi est ridicule. Tes camarades, ta prétendue famille t'ont adopté pour ta capacité à te battre."

"Qu'est-ce qu'être humain, Ridi? Est-ce par le sang ou la descendance que l'on gagne ce droit? Qu'est-ce qui soude une famille? Le sang ou la vie? Je suis du même sang que toi, mais j'ai vécu avec eux. Mon passé leur appartient comme j'appartiens au leur. Que suis-je? Qu'est-ce qui me défini? Suis-je le poids de mon corps, suis-je mon sang qui coule par mes blessures, suis-je les gènes de ma race? Suis-je les souvenirs de mon enfance, les gens qui m'ont appris la vie, ceux avec qui j'ai grandi? A qui doit aller ma fidélité dans ce cas? Nous sommes tout comme les humains des animaux pensants. Et la pensée supplante le corps, l'émotion l'hérédité. Voilà pourquoi je me bats pour eux. Parce que je peux vivre contre mon sang, mais pas contre mes émotions."

Emuiy se releva, époussetant négligement sa veste tandis que le sang dégouttait de sa manche droite. Main recouverte d'écailles, aux griffes recourbées de reptile. Visage lisse aux yeux durs. L'autre ne le vit pas s'élancer, ralenti qu'il était par ce qui avait été dit. Par le rejet de la race. Par la notion de sentiment, notion tellement humaine qu'il ne comprenait pas qu'un frère ait pu la comprendre. Alors la ressentir... Les griffes s'enfoncèrent dans sa gorge, à la lisière de la carapace écailleuse. Le sang jaillit, noir dans la nuit, noir sur le sol blanc. Il mourrut sans comprendre, avec la paix de l'ignorant. Peut être était-ce pitié de la part d'Emuiy de l'avoir achevé ainsi.
Silhouette verticale dans le monde applati par l'épaisse couche de neige, l'hybride regardait le corps d'un frère de sang avec l'indifférence de sa race. Il repensait à ce qu'il avait dit comme un humain et savait qu'il avait vaincu avec ses émotions. Etait-il aussi certain de tout ce qu'il avait dit? Qui cherchait-il à convaincre? A combattre? Il porta le corps de Ridi jusqu'à la rivière, où il coula. Essuyant sa main dans la neige, il reprit le chemin de la maison.